Rover, aloud !

Presse

  • Entretien Rover Angers/Le Courrier de l'Ouest 2.2.2022

    Le chanteur Rover sera en concert mercredi soir au Théâtre Chanzy, à 20 h 30 à Angers. Entretien.

    Comment allez-vous ?

    Rover : « Je viens d’arriver à Nantes (Rover était en concert précédemment à La Bouche d’Air) et je suis heureux. Tout ce qui me rapproche de la Bretagne me plaît ! La tournée se passe bien ; les gens viennent aux concerts. Je me rends compte à quel point cela s’est intensifié depuis le contexte qu’on a tous vécu. Cela donne une dimension supplémentaire à ce métier qui est à la fois fascinant, fatiguant et prenant. C’est dans ces moments-là que l’on peut réinventer sa musique, la partager, qu’il se passe quelque chose qui vous nourrit pour la suite. Il ne faut pas négliger ce privilège. »

    Vous avez conçu votre nouvel album, « Eskeller », dans une ancienne glacière à Bruxelles, dans des conditions très particulières. Auriez-vous fait un tout autre disque en un autre endroit ?

    « Sans aucun doute. Il aurait été complètement différent. Pas dans son esthétisme, ni dans le son, même si cela aurait sonné différemment mais c’est dans l’aspect invisible de la démarche, dans tout ce qui fait qu’un disque demeure inexplicable même après plusieurs écoutes. Pourquoi il est important de se mettre dans des conditions comme ça pour moi, dans des zones d’inconfort, c’est pour que la musique ne devienne à aucun moment transparente. La transparence en musique, c’est une absence de vie ; il faut de la matière, même dans le silence. Ces lieux-là permettent de s’appuyer sur de la matière, sur quelque chose de très concret et en même temps de très mystérieux. Je ne peux pas m’installer dans des acquis, dans des performances. Je ne suis pas quelqu’un qui cherche à impressionner, à démontrer mes qualités. Ce qui m’intéresse, c’est de montrer les endroits où je suis faible, qui me demandent beaucoup d’efforts et d’humilité. »

    La solitude faisait-elle aussi partie de ce processus de création ?

    « C’est venu très vite, depuis le premier disque. J’ai beaucoup de difficultés, non pas avec les êtres humains, que j’aime beaucoup (rire), mais avec le fait de ne pas perdre de temps avec les gens. Je n’ai trouvé personne qui me faisait gagner du temps. Personne n’est à séduire quand on est seul ; il n’y a pas de compromis à faire, pas de diplomatie à avoir. La solitude, c’est marcher seul dans la forêt, ne pas avoir de destination et continuer son chemin et c’est merveilleux. Les moments de doute sont des moments de récréation, jamais d’angoisse. Quand je ne suis pas en phase avec ce que je dois faire, je continue, je tourne autour : c’est comme une danse… parfois c’est l’instrument qui danse, parfois c’est nous. Je n’ai pas encore trouvé les mots pour dire à quel point c’est grisant. Les navigateurs en solitaire, les astronautes ressentent cela. On est les seuls témoins de ce qu’on vit, c’est ça qui rend fou et c’est ça qui est génial. »

    Comment regardez-vous votre parcours et l’évolution de votre art ?

    « C’est curieux car plus jeune, j’avais tendance à me projeter : il faudrait que tu voies tel pays, que tu collabores, que tu essaies tel son de studio… plein de projets liés à une fougue de la jeunesse. Aujourd’hui, je me rapproche du présent, de l’instant où la musique se fait. Les idées, en musique, c’est un peu nul, ça n’a pas vraiment de sens ; je ne cherche pas les disques remplis de bonnes idées. Je préfère les bonnes intentions, les bonnes émotions. Maintenant, je veux me rapprocher au plus près de l’essence même d’une chanson. Je veux aller encore plus loin avec moins… »

    D’où part une chanson chez vous : d’un son ? d’une image ? d’une référence ?

    « Rarement d’un son. Je n’ai pas trop cette culture geek à fouiner à la recherche de sons. C’est basé sur une émotion qui me tourne autour, qui est là le matin, l’après-midi, qui revient le soir ; cela peut être quelque chose de très positif, ou une colère, une forme de nostalgie, une projection dans l’avenir, juste un instant. Cela se transforme souvent en suite d’accords mélodiques. Parfois, cela vient d’un coup, comme des balles de fusil projetées sur l’instrument. »

    Comment pourriez-vous qualifier votre musique ?

    « L’exercice est dur car il peut tout de suite évoquer de la prétention. Très spontanément, je dirais qu’il y a une volonté d’être dans la filiation que ce que procure la musique classique. Encore une fois, en toute humilité. Ce qui est sûr, c’est que je ne suis pas dans un courant. Je suis un peu isolé à ce niveau-là. J’aimerais avoir une réponse simple mais disons que c’est une musique à la fois très contemporaine avec un ingrédient très traditionnel et avec l’envie de se projeter dans du très lumineux. »

    Rover en concert ce mercredi soir au Théâtre Chanzy, à 20 h 30. Première partie : Terrier. 20 € et 23 € (02 41 96 13 40).